Quelles avancées majeures sur les ODD passés en revue ? Sommes-nous sur la bonne voie pour relever les 17 défis en 2030 ? Quels pays en particulier ? Le Forum Politique de Haut Niveau est- il un exercice pertinent en lui-même ou doit-il se réformer et comment ?
Ces questions ont fait l’objet du débat bilan du FPHN organisé par le Comité 21 à la Banque Publique d’Investissement le 13 septembre, en présence d’Elisabeth Hedge, chercheure gouvernance et financement du développement durable de l’IDDRI, de Mélisa Cran, Directrice adjointe du Partenariat Français pour l’Eau, de Jennifer de Temmerman, Députée Nord, de Pierre Victoria, Directeur du développement durable de Véolia, et de Laurence Monnoyer-Smith, Commissaire générale au développement durable. Ils étaient tous au FPHN.
Le Comité 21, premier réseau français multi- acteurs du développement durable, contribue déjà depuis plus de 21 ans à la mise en oeuvre des ODD. Conférence internationale annuelle organisée par les Nations Unies pour assurer le suivi de la progression de la réalisation des ODD à travers le monde, le Forum Politique de Haut Niveau (FPHN) s’est tenu cette année, du 9 au 18 juillet à New York, sur le thème Transformation vers des sociétés durables et résilientes. Le segment technique s’est concentré sur 6 ODD en particulier : Eau & Assainissement, Energies propres, Villes et Communautés durables, production et Consommation responsables, Vie terrestre et les moyens de mise en œuvre & partenariats.
Le segment politique a permis à 47 pays de rendre compte officiellement de leur stratégie pour la mise en œuvre des ODD. La délégation officielle française menée par la secrétaire d’Etat, Brune Poirson, et la déléguée interministérielle au développement durable, Laurence Monnoyer Smith, était l’une des plus importantes de l’ensemble des délégations nationales, forte d’une participation sans précédent d’acteurs de la société civile.
L’IDDRI est l’Institut indépendant de recherche sur les politiques et plateforme de dialogue multi-acteurs: il identifie les conditions et propose des outils pour placer le développement durable au cœur des relations internationales et des politiques publiques et privées. L’IDDRI participera cet automne à une présentation publique du programme Nuclear Knowledges (cf. Chaire d’excellence en études de sécurité).
Bettina Laville, cofondatrice du Comité 21, est revenue sur le constat climatique de l’été, la démission de N. Hulot et la rentrée médiatique « Apocalypse ou pas? ». Elle a resitué le FPHN et le travail multiacteurs dans la perspective d’un futur plus aimable, les ODD étant des repères d’espoir. Elisabeth Hedge et Bettina Laville ont repris les mots forts du Secrétaire général de l’ONU en ouverture du Forum et depuis : on progresse dans quelques domaines, on régresse pour certaines cibles, nous n’atteindrons pas les objectifs en 2030. E. Hedge a regretté le fonctionnement en silo du forum tandis que les ODD ont cet avantage d’être transversaux. Elle a pointé la qualité hétérogène de revues nationales volontaires et l’aspect descriptif de l’analyse des politiques alors qu’on a besoin de savoir ce qui marche, ce qui est atteint; il faut évaluer. La feuille de route qui se prépare ne sera réussie que si elle impacte d’autres politiques, y compris le budget national. L’action doit primer avec le prochain forum sous l’égide de l’Assemblée générale des Nations Unies et la présidence française du G7.
La députée Nord Jennifer de Temmerman a souligné l’importance des collectivités locales et du dialogue entre les différents échelons de gouvernance pour l’atteinte des ODD. Les ODD ne sont pas une lubie urbaine, ils vivent aussi dans les territoires ruraux et périurbains. Bettina Laville a insisté sur l’importance de constituer une force parlementaire pour les ODD. La députée prépare dans sa circonscription un festival des ODD un événement à l’Assemblée nationale pour la constitution d’un groupe d’étude, de réflexion, l’évaluation de l’action parlementaire sur les ODD.
Melisa Cran, du Partenariat Français pour l’Eau, s’est réjouie qu’au FPHN une dizaine d’organisations du PFE aient répondu présentes. Le PFE est une plateforme multi-acteurs des acteurs de l’eau et de l’assainissement. Leur délégation au FPHN se composait d’une représentation d’un peu tous leurs collèges. Il y a eu une déclaration interministérielle rappelant la situation alarmante mais pas de prise de décision. Le forum se déroule beaucoup trop en silos. M. Cran a évoqué l’excellent rapport de Human Water qui en synthèse dit clairement que les objectifs sur l’eau ne seront pas atteints en 2030 – voir aussi Water Aid.
Des objectifs ont été dégagés au FPHN sur l’accès à l’eau potable et à l’assainissement en Outre Mer. Les acteurs de la solidarité internationale se sont approprié les ODD. Mais pour la grande majorité, les ODD sont encore méconnus. Ceci s’explique aussi par le manque de ressources financières et humaines dédiées. Il y a un besoin criant de campagne de sensibilisation à l’agenda 2030. Le PFE travaille à un guide à l’usage des élus pour l’atteinte des ODD; ce guide sortira en novembre à l’occasion du Salon des maires. Il faut une volonté politique. Les mobilisations isolées ne suffisent pas. La feuille de route de doit pas être un document technocratique.
P. Victoria, Directeur du développement durable de Véolia, est revenu sur la première journée Business Official portant sur la question de savoir comment les entreprises peuvent participer à des villes inclusives et durables mais aussi sur l’intégration des ODD dans les chaînes d’entreprises, notamment les PME et sur les partenariats possibles avec les ODD. Il a évoqué la deuxième journée du Conseil Mondial des Affaires pour le Développement Durable (WBCSD).
C’était une occasion majeure pour le secteur des entreprises de démontrer leur contribution à la poursuite des ODD et de témoigner leur sens de la responsabilité en la matière. Les ODD sont un cadre de la RSE et influence les business models; il y a un élargissement de la chaîne de responsabilité des entreprises.
Les ODD sont le document de référence évident; peuvent- ils être le cadre de pilotage de la RSE ? Les objectifs de reporting et d’évaluation ne sont pas communs. Avec le développement des agences de notation extra financières, on va vers du scoring sur les ODD; il ne faut pas laisser aux agences le soin de définir quelles sont les entreprises les plus avancées sur les ODD. La question du rachat par des agences de notation financières pose problème. Le Global Compact GRI a lancé un travail sur les ODD en entreprise.
Laurence MONNOYER-SMITH, la commissaire générale au développement durable, a évoqué des groupes de travail existants et le RV de 2019 avec le Président de la République. Elle a déjà mentionné devant le nouveau ministre les ODD lors d’une réunion des directeurs généraux. Elle veut des indicateurs sous l’aune des ODD, un travail auprès des parlementaires, une revue nationale parlementaire et qu’en 2019 la France soit l’un des 3 grands pays sur les 46 à présenter une revue volontaire au FPHN.
Elle a annoncé :
– un site ressource nouveau avec un comité éditorial ouvert qui doit devenir un lieu de vie participatif pour les ODD agenda-2030.fr;
– se fixer des objectifs par alliances, une communauté d’actions avec des objectifs délimités, additionnels et mesurables;
– une plateforme indépendante des acteurs non étatiques;
– une revue nationale volontaire 2019 participative.
L. Monnoyer-Smith a également cité un conseil transversal européen des ODD et un Reflection paper.